La mobilité active, essentielle pour un vieillissement en santé
L’accès facile et sécuritaire vers les destinations du quotidien est un enjeu important pour les aînés, notamment lorsqu’on considère que ces lieux ne sont pas fréquentés uniquement pour consommer. En effet, une bonne accessibilité aux services et aux équipements peut avoir des effets bénéfiques sur la santé et le bien-être des aînés et contribuer à leur inclusion sociale (Apparicio et Séguin, 2006; Scharf et collab., 2010) limitant ainsi leur vulnérabilité.
Faute de pouvoir se rendre, de façon la plus autonome possible, aux commerces, aux services et aux équipements publics dont ils ont besoin au quotidien (épicerie, pharmacie, bibliothèque, etc.), les aînés marchent moins, sortent moins et diminuent leurs interactions sociales (Mercille, 2013). Non seulement en perte de bien-être et en situation d’isolement social, ils deviennent plus sédentaires et diminuent leurs chances de vieillir en santé (OMS, 2007).
La dépendance à l’automobile : un facteur de vulnérabilité
Les déplacements motorisés constituent, comme pour le reste de la population, le mode favori des aînés : au Canada, conduire était en 2009 la principale façon de se déplacer pour 59,8 % des 65 ans et plus (Statistique Canada, 2012). Même si les aînés qui sont en mesure de se déplacer en automobile sont plus susceptibles de participer à des activités sociales (Statistique Canada, 2012), cette dépendance à l’automobile n’est pas sans conséquences :
- La dépendance à l’automobile est généralement associée à l’inactivité physique, alors que l’OMS recommande aux aînés de faire au moins 150 minutes d’activité d’endurance d’intensité modérée par semaine (OMS, s. d.).
- Le recours à l’automobile varie significativement selon le genre et l’âge des personnes, ou encore selon le niveau de densité résidentielle du quartier (Statistique Canada, 2012), exposant des populations spécifiques à un risque d’isolement accru.
- L’utilisation d’une automobile nécessite certaines capacités physiques et économiques. Une évolution de celles-ci peut facilement rendre vulnérables des individus, particulièrement lorsque les autres modes de déplacements sont difficiles d’accès. Au Québec, près de 30 % des plus de 65 ans n’ont pas de permis ou ne sont plus en état de conduire, soit 312 400 personnes. En 2009, 18,3 % des 65 à 74 ans n’avaient pas accès à un véhicule motorisé, une proportion qui passe à 41 % chez les plus de 75 ans (Statistique Canada, 2012).
S'attaquer aux enjeux du vieillissement exige de tenir compte de la perte de mobilité, éventuelle ou effective, des personnes âgées et de permettre les déplacements actifs. Différentes stratégies s’offrent aux collectivités souhaitant faciliter la vie aux aînés à ce niveau. À court terme, il est possible de pallier l’accès limité aux déplacements motorisés en offrant des services de transport adapté, ou encore en soutenant les réseaux d’entraide, tout comme il est possible de promouvoir l’activité physique de loisir pour améliorer leur santé. Toutefois, à plus long terme, c’est dans l’aménagement du territoire urbain que résident les approches les plus structurantes, puisqu’elles influencent la proximité des activités et la possibilité de se déplacer activement. Par ailleurs, l’amélioration de l’accessibilité de l’environnement urbain pour les aînés bénéficie généralement à l’ensemble des individus, qu’ils soient en situation de vulnérabilité ou non.
Réduire les distances
Qu’ils aient accès ou non à un véhicule, avec l’âge, les aînés ont tendance à réduire les distances parcourues en voiture et à fréquenter des lieux plus près de leur domicile (Lord et Després, 2011). Pour tenir compte de ce resserrement des milieux fréquentés par les aînés, il convient d’aménager les milieux de vie de manière à assurer la proximité des commerces et des services du quotidien, par (Vivre en Ville, 2014) :
- une localisation stratégique des activités, misant sur les synergies urbaines, qui devrait également s’appliquer aux résidences pour personnes âgées;
- une mixité des activités permettant de répondre aux besoins quotidiens à proximité des lieux de résidence;
- une densité résidentielle suffisante pour assurer la viabilité des commerces et services de proximité;
- une forme compacte qui participe à créer un cadre bâti à échelle humaine;
- une bonne perméabilité de la trame urbaine, notamment grâce à des cheminements courts (îlots de petite taille, densité d’intersection) entre les lieux où l’on retrouve une importante concentration d’aînés et les destinations significatives pour ceux-ci (épicerie, services de santé, services publics, arrêts de transport en commun, etc.).
Réduire les obstacles et assurer la convivialité des déplacements actifs
Les environnements urbains sont souvent peu favorables aux déplacements actifs des aînés. Au défi que représente déjà la distance à parcourir d’un lieu à un autre s’ajoutent des obstacles importants (Michael et collab., 2006; Lachapelle et Cloutier, 2017; Day, 2010), notamment l’insécurité (particulièrement liée à la circulation automobile) et l’inconfort des déplacements (irrégularités de la surface de déplacement, éclairage, présence de mobilier urbain, ombrage, vent, etc.).
Pour éliminer ces contraintes, les collectivités soucieuses d’améliorer les conditions de déplacement des aînés sur leur territoire devraient chercher à :
- limiter les risques liés à la circulation automobile, notamment en améliorant la sécurité des piétons aux intersections (avec, entre autres, des phases piétonnes adaptées à la vitesse de marche des aînés), en limitant les vitesses véhiculaires pratiquées et en aménageant des trottoirs;
- assurer l’accessibilité universelle des parcours piétons (voir Société Logique et Institut Nazareth et Louis-braille, 2014; Ville de Montréal, 2017);
- assurer un bon entretien des infrastructures piétonnes, en toute saison (déneiger, réparer les défauts de surface sur les trottoirs, éviter les entraves, etc.), de façon à assurer le confort du déplacement et à limiter les risques de chute;
- offrir un cadre attrayant pour les déplacements actifs (végétation, protections contre les intempéries, mobilier urbain permettant le repos, etc.).
Pour aller plus loin… considérer les déplacements cyclables
Dans certains pays, notamment européens, le vélo est un mode de déplacement utilitaire est répandu dans toutes les tranches d’âges de la population. La situation est bien différente au Québec, où les aînés n’avaient pas traditionnellement l’habitude de faire du vélo (de loisir ou utilitaire). Cependant, cette situation change : « de 12 % en 1995, le taux de cyclistes [de 65 à 74 ans] a plus que doublé, pour atteindre 29 % » (Vélo Québec, 2016). Cette croissance, vraisemblablement associée au vieillissement d’une population habituée à la pratique du cyclisme, doit être prise en considération pour l’aménagement des espaces publics.
Il s’agit d’une activité physique intéressante pour les personnes âgées puisque peu agressive pour les articulations des genoux et des hanches (IUGM, s. d.). De plus, le vélo donne accès à un plus grand éventail de destinations pour un effort limité, sans parler de la popularité croissante des vélos à assistance électrique.
L’aménagement d’infrastructures cyclables de qualité, séparées physiquement de la circulation, a le potentiel d’attirer de nouveaux cyclistes, particulièrement chez les aînés (Walljasper, 2015). De plus, de tels aménagements permettent de limiter la présence de vélos sur les trottoirs, ce qui influence le sentiment de sécurité chez les aînés plus vulnérables (Walljasper, 2016).