Cet article est l'une de trois études de cas traitant de façons de gérer certains enjeux de la rue apaisée. Les deux autres sont :
La gestion des eaux pluviales et l’espace public
Différentes mesures, mises en œuvre à grande et à petite échelle, permettent de favoriser l’infiltration de l’eau dans le sol et ainsi de réduire les volumes et les débits dans les égouts pluviaux. Ces pratiques peuvent être intégrées dans la réglementation municipale, dans les projets immobiliers privés, et dans les aménagement publics (rues, parcs, etc.).
Les noues, une mesure efficace
Les noues végétalisées sont des espaces s’apparentant à des fossés larges et peu profonds vers lesquels sont dirigées les eaux pluviales (L’Atelier Urbain, 2017). Elles visent à ralentir le débit d’eau le long des rues pour, d’une part, favoriser la filtration et la sédimentation des matières en suspension et, d’autre part, accentuer l’infiltration des eaux pluviales. Les végétaux y jouent un rôle très important de filtration, tout en augmentant la biodiversité. En milieu urbain, ces mesures permettent également d’atténuer les îlots de chaleur.
Au-delà des bénéfices environnementaux, les noues peuvent contribuer à la sécurité et la convivialité des déplacements, lorsque leur aménagement est associé à une réduction de la largeur de la chaussée et à une meilleure délimitation des espaces de la circulation.
Enfin, les noues aident à sensibiliser la population aux principes du développement durable et peuvent jouer un rôle important dans l’augmentation de l’acceptabilité sociale de la transformation des milieux bâtis (réaménagement de rue, densification, etc.) grâce à leurs qualités esthétiques et fonctionnelles.
L’exemples des rues Saint‑André et Lansdowne
Le contexte
À plusieurs reprises, le territoire de la ville de Granby a été touché par des fortes pluies causant des refoulements d’égouts. La Ville a donc décidé d’intervenir dans un secteur fortement touché, celui du quadrilatère entre les rues Saint‑André Est et Lansdowne.
Le projet initial de la Ville était de réaliser un réseau de conduites de grande capacité, servant de bassin de rétention souterrain (ROBVQ, 2015), dont le coût était estimé à 3,7 millions de dollars. La Ville de Granby a toutefois décidé de saisir cette occasion pour réaliser un projet d’aménagement permettant non seulement de gérer les eaux pluviales de façon optimale, mais aussi d’accroître la sécurité des écoliers circulant dans le secteur (Carbonneau et Méthot-Borduas, 2017).
Le projet
Conçu par le service des travaux publics de la Ville de Granby et réalisé en 2013, le réaménagement des rues Saint‑André et Lansdowne sur un total de 1 130 mètres linéaires a coûté 2,35 millions de dollars, soit environ 1,3 million de dollars de moins que le projet initial, plus conventionnel. En outre, le projet a bénéficié d’une aide de plus de 1,5 million de dollars du Fonds municipal vert de la Fédération canadienne des municipalités (FCM) (Patenaude, 2017).
Rue Saint-André Est | |
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Avant | Après |
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Lansdowne | |
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Avant | Après |
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Les résultats et apprentissages
Des bénéfices nombreux
Le choix d’implanter des noues végétalisées a permis(Carbonneau et Méthot-Borduas, 2017) :
- d’accroître les espaces verts et de réduire les îlots de chaleur urbains ;
- de contrôler la qualité de l’eau pluviale ;
- de diminuer considérablement les risques de refoulement des égouts pluviaux dans le secteur ;
- d’améliorer la sécurité des piétons, notamment des écoliers qui marchent quotidiennement vers les deux écoles du secteur par :
- la réduction de la largeur de la chaussée ;
- la présence des végétaux entre le trottoir et la chaussée ;
- l’ajout de passages piétonniers sécuritaires à des endroits stratégiques ;
- de réduire la vitesse de circulation. La rue Saint‑André est une rue locale, en partie résidentielle, qui est régulièrement utilisée comme une rue de transit entre le boulevard Leclerc Est et la rue Dufferin. Le rétrécissement de la chaussée et les avancées de trottoirs ont contribué à réduire la vitesse de la circulation automobile (Létourneau, 2017).
Un processus de sensibilisation essentiel
La réussite du projet s’explique non seulement par la qualité des aménagements, mais également par les efforts qui ont été déployés pour sensibiliser la population et répondre aux craintes et aux appréhensions des résidents. Ce processus a été réalisé en quatre étapes (Carbonneau et Méthot-Borduas, 2017) :
- envoi d’une brochure pour expliquer le projet aux résidents directement touchés ;
- rencontre avec les habitants du secteur pour discuter de leurs inquiétudes, notamment de la perte de stationnement sur rue et de l’efficacité du système proposé par rapport au système traditionnel ;
- publication d’un article dans le journal local pour informer le grand public ;
- remise d’un rapport aux citoyens du secteur sur les résultats de l’inspection des installations de plomberie.
L’efficacité économique, une condition essentielle
En dépit de ses qualités, le projet a suscité des appréhensions importantes. Les citoyens s’inquiétaient notamment des coûts à long terme de l’entretien des végétaux et doutaient de l’efficacité réelle des mesures proposées. Les données recueillies ont toutefois montré que les coûts d’entretien (ménage printanier et mise à niveau) étaient d’environ 9 dollars par mètre linéaire au cours des premières années. Cependant, ceux-ci devraient chuter à environ 5 dollars par mètre linéaire après 15 ans, soit moins que le coût des solutions conventionnelles. En outre, afin de tirer pleinement profit de ces investissements, la Ville prévoyait utiliser ces aménagements comme une pouponnière à végétaux pour d’autres projets à réaliser sur son territoire.
Des ajustements nécessaires
Dès la mise en place du projet, les citoyens étaient impatients que les végétaux atteignent la maturité et une plus grande taille. Cependant, il a fallu enlever les amélanchiers après deux ans à cause des plaintes concernant la réduction de la visibilité en raison de leur dimension. D’autres modifications ont également été effectuées au cours des premières années, comme le déplacement de certaines graminées qui avaient été plantées trop près des entrées charretières et la modification des rayons d’encoignure des entrées charretières pour en faciliter le déneigement.