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Transit-oriented development (TOD)

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Publication : 25 octobre 2013

Développé par Peter Calthorpe en 1993, le concept de Transit-oriented development se veut une approche visant à favoriser l’articulation de l’urbanisation et du transport collectif. Le TOD propose l’établissement de collectivités dans lesquelles les habitants peuvent facilement accéder à pied (c’est-à-dire dans un rayon approximatif de 600 mètres) à un noyau de services et de commerces et à une station de transport collectif. Cette approche urbanistique a été mise en oeuvre plus particulièrement en Amérique du Nord. L’influence de ces initiatives sur la modification des comportements de mobilité de la population varie en fonction du contexte local et de la prise en compte des principes à la base du concept de TOD.

n.b. Cet article reprend en partie les propos développés plus en détails dans l’ouvrage de Vivre en Ville paru en 2013 : Retisser la ville : [Ré]articuler urbanisation, densification et transport en commun.

Le concept et son origine

L’articulation des milieux de vie et du transport collectif n’est pas une idée entièrement nouvelle. Dans la foulée des Streetcar suburbs, qui ont fleuri jusqu’à l’époque de l’après-guerre, des initiatives ont visé l’articulation du transport collectif et de l’urbanisation depuis plusieurs décennies. Certains exemples s’approchent fortement du concept de Transit-oriented development élaboré par Calthorpe. On peut notamment citer le projet de “ville ABC” expérimenté à Vallingby en banlieue de Stockholm (Suède) dans les années 50. C’est également le cas du Bull’s eye concept qui a guidé l’urbanisation du corridor Rosslyn-Ballston autour du métro traversant le conté d’Arlington (Virgine) en banlieue de Washington à partir des années 1970 (Cervero, 2006). La démarche entreprise dans la région métropilitaine de Portland (Oregon) dans les années 1980-1990 appelée LUTRAQ (Land Use, Transportation and Air Quality connection) représente également une tentative de s’attaquer à l’échelle métropolitaine aux objectifs identifiés plus tard par Calthorpe (Vivre en Ville, 2013). L’essence de l’approche du TOD est d’offrir aux résidents et travailleurs qui fréquentent les secteurs la possibilité d’utiliser des modes de transports autres que l’automobile pour pourvoir à leurs besoins de déplacements (MAMROT, 2011).

Originalité du concept de Calthorpe

Dans son ouvrage phare The Next Metropolis, Peter Calthorpe élabore et illustre plusieurs des caractéristiques du TOD tel qu’il le conçoit. Il insiste sur le caractère nodal du TOD, où les commerces, les équipements communautaires et les autres activités à caractère public sont regroupés au cœur du quartier, lequel se situe à proximité d’une station de transport en commun. Il oppose ainsi le TOD à la strip commerciale de banlieue, plus linéaire.

L’objectif de cette concentration est de favoriser les déplacements piétonniers pour d’autres raisons que le simple accès à la station de transport en commun. Il affirme en parallèle qu’un environnement monofonctionnel à proximité des stations de transport en commun rend sa traversée à pied plus désagréable, diminuant du coup l’attrait du transport en commun et son utilisation (Vivre en Ville, 2013). 

Illustration originale du TOD selon Calthorpe
Illustration originale du TOD selon Calthorpe –Source : Peter Calthorpe, The Next American Metropolis

Cela influence directement la représentation schématique du TOD que l’on retrouve aujourd’hui reprise dans une multitude de sources comme étant un quartier circulaire organisé de manière radiale autour d’une station de transport collectif.

À la base, la forme du TOD imaginée par Calthorpe a pour but de répondre à certains principes fondamentaux:

La ville du transport en commun

La croissance de la ville doit prendre appui sur des réseaux structurants de transport en commun tant à l’échelle locale que métropolitaine.

La ville des courtes distances

La ville doit offrir à ses résidents, étudiants, travailleurs et visiteurs une plus grande proximité entre les activités afin d’encourager le recours aux déplacements actifs puis au transport en commun. Les moyens proposés, comme la densification et la mixité des activités, s'inscrivent en faux par rapport au zonage traditionnel. Depuis l'après-guerre, ce dernier a conduit à la création de secteurs monofonctionnels, et donc à l'éloignement toujours plus grand entre les habitations et les autres activités, dans les banlieues nord-américaines.

La ville de qualité et à échelle humaine

La ville doit être structurée par un réseau d’espaces publics variés et de qualité, et privilégier une architecture à échelle humaine en étroite relation avec ce réseau.

La ville vivante et animée

En utilisant le terme “collectivité” (community en anglais), Calthorpe fait du transit-oriented development plus qu’un simple ensemble immobilier : il en fait un véritable milieu de vie. Pour s’en assurer, Calthorpe va au-delà des simples considérations esthétiques et préconise d’agir sur le cadre de vie dans son ensemble : localisation du quartier, relation avec la ville existante, limites et vocation du quartier, types et distribution des activités, trame de rues, composition architecturale, etc. (Vivre en Ville, 2013)

Le transit-adjacent development : le TOD qui tourne mal

Plusieurs quartiers et projets immobiliers ponctuels se réclament du TOD ou d’approches apparentés tant au Canada qu’aux États-Unis. L’atteinte des principes identifiés par Calthorpe varie selon les cas et ne repose pas uniquement sur la présence d’une station de transport collectif ou à des formes bâties néo-traditionnelles associées au Nouvel Urbanisme (Vivre en Ville 2013). Certaines expériences moins heureuses, comme les aménagements aux abords des stations Hayward et Freemont du réseau BART de San Francisco on été qualifiées de TAD, ou Transit-adjacent development (Renne, 2005 et 2009).

Fremont Station, San Francisco (États-Unis) – Source : Google Maps

Des ensembles immobiliers ont été construits à proximité de stations de transport collectif, mais les choix effectués en matière d’aménagement urbain font en sorte que l’automobile y demeure dominante (Cervero 2002). L’automobile y est privilégiée pour accéder à la station de transport en commun du quartier, grâce à d’importants stationnements incitatifs qui favorisent cette pratique intermodale, au détriment de l’usage d’autres modes de déplacement comme le vélo ou la marche.

En somme, l’interprétation des principes du TOD se traduit par différentes formes urbaines qui s’éloignent dans certains cas de la définition donnée à ce concept par Calthorpe : faible niveau de mixité fonctionnelle, une proximité variable des différentes activités, cœur de quartier mal défini ou inachevé...

Dans leur volonté de guider l’urbanisation de leur territoire, un nombre grandissant de municipalités tendent à intégrer les principes du TOD à leur planification et encadrent les différentes facettes de l’aménagement urbain afin d’atteindre les objectifs désirés. L’organisation TransLink de Vancouver, responsable de la planification des transports dans la région métropolitaine, a d’ailleurs publié un guide portant sur Transit-oriented communities, une appellation qui met en valeur le fait qu’un TOD ne peut se résumer à un ensemble immobilier. Le développement de ce genre de quartier est prévu aux abords du Frequent Transit network, soit le réseau structurant de Vancouver, qui comprend des lignes d’autobus à haut niveau de service et le réseau de train léger rapide appelé Skytrain (TransLink, 2012).

Le TOD au Québec

Le principe de TOD a inspiré certains projets immobiliers dans la région métropolitaine de Montréal, notamment le Faubourg Boisbriand, le Village de la gare de Mont-Saint-Hilaire et certaines initiatives de requalification urbaine entourant la gare de train de banlieue de Sainte-Thérèse. Les impacts de ces interprétations québécoises sur les résultats attendus en matière de mobilité de la population sont encore difficilement mesurables d’autant que certains aspects des projets ne sont pas achevés.

À titre d’exemple, les abords de la gare de Mont-Saint-Hilaire sont peu favorables à la marche en raison de la présence d’un vaste stationnement incitatif et le cœur de quartier qui devait prendre place à cet endroit n’a jamais été réalisé. De même, la gare de train de banlieue envisagée pour le Faubourg Boisbriand ne s’est pas encore matérialisée.

Le Plan métropolitain d’aménagement et de développement (PMAD) de la Communauté métropolitaine de Montréal propose de recourir au concept de TOD afin qu'un minimum de 40 % des nouveaux ménages attendus d’ici 2031 s’établissent dans des quartiers s'inspirant de ce principe. L’objectif est de concentrer ainsi la croissance démographique à proximité du réseau structurant de transport en commun. Toutefois, la définition retenue du réseau structurant ne fait pas l’unanimité. Le niveau de desserte actuel et prévisible diffère fortement selon le contexte, passant de quelques départs offerts en pointe à plusieurs centaines de passages quotidiens. Cette disparité de l’offre limite les possibilités d’une articulation forte de l’urbanisation et du transport en commun dans certains secteurs identifiés comme aire TOD.

Conclusion : quelle influence sur la mobilité de ses résidents?

Un rapport de recherche réalisé par le Transit Cooperative Research Program en vient à la conclusion que les quartiers inspirés des principes du TOD produisent moins de déplacements en automobile et que leurs résidents utilisent davantage le transport collectif qu’ailleurs dans l’agglomération. Les facteurs pouvant expliquer ces différences sont multiples et ne peuvent se résumer à la proximité d’un service de transport en commun. Une des clés repose sur l’autosélection en matière de choix résidentiel: les quartiers dont le design répond aux principes du TOD attirent en priorité les clientèles qui utilisent le transport en commun ou souhaitent le faire (Cervero et Arrington, 2008). S'il est difficile d’associer directement le TOD à une modification des pratiques de mobilité de la population, il s'agit à tout le moins d'une offre d'environnement favorable souhaitée par un segment de la population qui ne recherche pas un quartier où la voiture est omniprésente.

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Notice bibliographique

Publication : 25 octobre 2013
VIVRE EN VILLE (2013). « Transit-oriented development (TOD) », Collectivitesviables.org, Vivre en Ville, octobre 2013. [https://collectivitesviables.org/articles/transit-oriented-development-tod.aspx] (consulté le 19 avril 2024).


Références

BOUCHER, Isabelle, et Nicolas FONTAINE (2011). L’aménagement et l’écomobilité, Guide de bonnes pratiques sur la planification territoriale et le développement durable. Ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire. [PDF] 232 p. (coll. « Planification territoriale et développement durable »)

CALTHORPE, Peter (1993). The Next American Metropolis, New York : Princeton Architectural Press, 175 p.

CERVERO, Robert (2006). Public Transport and Sustainable Urbanism: Global Lessons. [PDF] 10 p.

CERVERO, Robert, et G. B. ARRINGTON (2008). Effects of TOD on Housing, Parking, and Travel, Rapport produit dans le cadre du Transit Cooperative Research Program (TCRP 128), Washington : Transportation Research Board. [PDF] 67 p.

CERVERO, Robert, Christopher FERRELL, et Steven MURPHY (2002). Transit-Oriented Development and Joint Development in the United States: A Literature Review, Rapport produit dans le cadre du Transit Cooperative Research Program (TCRP 52), Washington : Transportation Research Board. [PDF] 144 p.

COMMUNAUTÉ MÉTROPOLITAINE DE MONTRÉAL [CMM] (2012). Guide d’aménagement pour les aires de TOD (Transit Oriented Development). [PDF] 84 p.

RENNE, John L. (2009). « From Transit-Adjacent to Transit-Oriented Development ». Local Environment, vol. 14, no 1, p. 1-15.

RENNE, John L. (2005). Transit-Oriented Development: Measuring Benefits, Analyzing Trends, and Evaluating Policy. New Brunswick (NJ) : The State University of New Jersey, 240 p.

TRANSLINK (2012). Transit-oriented Communities Design Guidelines. Creating more livable places around transit in Metro Vancouver. Burnaby (B.C.) : TransLink. [PDF] 172 p.

VIVRE EN VILLE (2014). Retisser la ville : [Ré]articuler urbanisation, densification et transport en commun, 2e éd. 108 p. (coll. « Outiller le Québec ») [+info]